• La surprise à l'unanimité de Janik Coat” Après quelques années à illustrer des livres pour le monde de l’édition, j’ai souhaité écrire mon propre livre. Comme je sais dessiner, j’ai tout écris en image, sans aucun mot. Mon éditrice était plutôt sceptique mais elle m’a aidé. Le livre a trouvé son public, il plait aux enfants, aux jeunes femmes et aux adultes. Je suis fière de recevoir aujourd’hui ce prix remis par les enfants”.

    Janik Coat pour BriveMag.fr http://www.brivemag.fr/?p=70003

     

     

     Cet automne, je suis tombée sur ce livre à la lettre C de la médiathèque de Jaude. Il m'est paru évident que je devais l'emprunter et qu'il était le livre idéal pour commencer ce blog. La bibliothécaire aux cheveux blancs qui a enregistré mes documents ce jour-là a enfoncé le clou en me disant que ce livre était formidable (ce n'est pas tous les jours qu'elles se prononcent !).

    J'ai depuis rendu ce livre qui parle de naissance de la plus belle manière. Je regrette un peu de ne pas l'avoir laissé trainer afin que mon fils le parcoure si l'envie l'en prenait, ou me demande de le partager avec lui. Ce livre couvert d'aplats d'encre est dépourvu de texte.

    J'ai tapé Janik Coat sur internet pour voir ce qui se disait sur cet ouvrage. Et là, boum, La surprise de Janik Coat fait l'unanimité depuis sa sortie en  août 2011. Les libraires, lecteurs, bibliothécaires, amateurs de livres et de douceur sont unanimes, élogieux et les textes s'alignent, pas trop longs car à tâton mais tout de même ... des mots, des mots pour essayer de parler de ce livre sans texte. Tout le monde a été touché mais rien de ce que j'ai lu ne me parle de ce livre. A vrai dire cela me l'a un peu gâché. L'article simplement journalistique qui couvrait la foire de Brive m'a heureusement emmenée ailleurs. Près de 2000 enfants et donc pas mal d'adultes ont lu ce livre dans les écoles de Corrèze !

    Ce livre sans mots résiste à ce qu'on parle de lui comme on l'a ressenti. Je ne peux pas en parler mais lis-le, ce livre sans texte, car si je le raconte cela ne fera qu'appauvrir le graphisme, le déroulement, le thème et l'empreinte qu'il laisse en nous. Car tous les éléments qui font ce livre rouge au chat gris sont hors mot, comme on dit hors champ (c'est toujours ce qu'il y a de plus intéressant, qui intrigue le regard).

    Quant à Janik Coat elle nous donne la clef de cette oeuvre en exergue, cela tient en trois mots "A ma soeur".

    La surprise, "conte graphique" édité chez Memo. "Sans bruit, sans prose, La surprise rappelle la force et les surprises que nous réserve la vie". http://www.editions-memo.fr/La-surprise


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  • Orange et noir Quelle surprise ! Kitty Crowther fait de la gravure avec ses crayons de couleur.

     Les surfaces noires et brillantes, petites comme plus grandes sont grattées. Et cela me dit que du noir ça ne se fait pas tout seul, l’ombre se taille, se creuse sur le papier.

     Une feuille, c’est plat mais ça permet de sonder ce qui se cache à l’intérieur du noir, derrière « les bruits de la nuit ».

     Les traits aux couleurs explosives et les ocres verts aussi sont marqués, tracés d’une main ferme. Ce n’est pas qu’ils restent figés à faire la statue antique, ils sont bien décidés à être là. Je les ai observés d’abord comme contours des personnages (à l’image du totémique homme aux insectes). Personnages affirmés dans leur étrangeté, ou plutôt leur naturel à eux. Tracés à un moment de leur histoire, dans une posture, entre deux autres instants. Ils baignent dans leur élément, leur chez eux intime -  la table, la chaise, le lit, le désordre - et leur dehors, la nature – où le nénuphar aussi est un lit. Ces deux  milieux sont reliés, douillets, agréables.

     Ces personnages sont là, actifs, émotifs, et rejoignent mille personnages sombres ou gais de l’histoire de l’art. Multiples et différents. Ils empruntent à l’homme autant qu’à l’animal.

     On ne peut que sourire et être heureux devant ces dessins. Rien de technique là-dedans, c’est sûr. Il s’agit de langage pur. On aimerait apprendre à parler ainsi, du moins moi, quel que soit le langage utilisé.

    Ces dessins originaux présentés à l’initiative du Centre de l’illustration de Moulins, je ne pensais pas les voir un jour. Quelle aubaine ! Je me suis promenée tranquillement d’une salle à l’autre, invitée à découvrir une œuvre qui mène sa propre vie en dehors du livre. Le flux vital émane et circule d’une planche à l’autre et nous emmène aussi si l’on est partant. Les murs de l’Hôtel de Mora construit au XVIII ème siècle sont en tous cas complices. Ca bruisse sous le feuillage, ça papote. Ailleurs, ça réfléchit au bord de l’eau, au bord du monde « dans soi ».

     Mon mari et mon fils sont revenus plusieurs fois dans la pièce où est projeté discrètement « The bench ». Cette animation les a aimantés. D’un commun accord ils retournent entendre cet ovni naturel.  La vidéo se juxtapose aux dessins orange et noir. Pépites sur papier.

     De retour chez moi, j’ai la chance d’avoir sous la main un bout de cette œuvre. Quelques volumes constituent notre trésor familial : des lutins souples et des Pastel, Seuil ou Memo durs, le merveilleux fascicule de l’école des loisirs aussi.

     Le sentiment de posséder un bout de l’œuvre est le même qu’avec une bonne édition de dessins de Daumier. Sauf que le livre pour enfants se partage et s’anime à chaque fois qu’on le lit, il s’éveille, s’étire, nous embrasse puis se rendort dans son cocon chaleureux.

     Même le nuage bleu de Tomi Ungerer se rendort, même s’il y a eu la guerre dessinée, et que la violence a été dite peut-être pour la première fois à un enfant. Le sommeil se fait plus calme, le réel plus riche de sens.

     Le livre jeunesse s’égrene calmement. Difficile de mal lire un bon livre jeunesse à son enfant.

    Mei et Satsuki plantent les petites graines une à une en pleine nuit …. C’est doux, ça pousse, c’est immense.

     Je rêve d’une maison, avec un jardin.

     Ce jardin, c’est déjà le sien.


    L'exposition "Tout va très bien..." aura lieu jusqu'au 22 janvier au Centre de l'illustration de Moulins dans le cadre du festival. http://festivaldesillustrateurs.com/

     


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  • Aux commencementsLes deux auteurs qui se répondent, texte après texte font preuve ici de beaucoup de malice et d’intelligence. Ils se connaissent de longue date et aiment échanger ensemble avec entre eux le pot commun de la création jeunesse. Cette démarche a donné lieu à un beau bébé littéraire.

    Franz Hohler et Jürg Schubiger avaient initié cette démarche en 1985, avec Histoires en ping pong chez le même éditeur.

    Aux commencements parle de la création du monde entre poésie et philosophie : Il conte des créations du monde burlesques et riches de sens. On sourit, rit et réfléchit en lisant ce petit livre au format et à la façon très agréable (un vrai beau livre, léger comme je les aime…).

    L’humour et la finesse des auteurs permettent de juxtaposer, mélanger, bouleverser, inverser les données, les codes, répondant à différentes théories de la création du monde, qu’elles soient fondées ou fantaisistes. Cette cuisine inventive et réflexive nous mène à deux voix sur le chemin de l’apparition du monde de l’infini grand à l’infiniment fourmi.

    Jutta Bauer, que je découvre ici, signe des illustrations d’une grande sobriété-sensibilité qui laissent toute sa place au blanc de l’univers et au noir du texte porteur d’images.

    Ses dessins combinent au mieux le travail minimal du papier collé (réf. Petit jaune et Petit Bleu de Leo Lionni) et celle des dessins au crayon de couleur. Elle utilise toutes les possibilités de la double page au format paysage en écho à ce nouveau ping pong des deux auteurs.

    Merci donc, pour ces propositions de commencements à Messieurs Bédam et Cédam.

    Aux commencements.
    Suite de textes de Jürg Schubiger et Franz Hohler. Illustrations de Jutta Bauer. 2006 Éditions suisses  La joie de lire (créées en 1987). http://www.lajoiedelire.ch/cms/historique

     

    http://data0.revolublog.com/alors/mod_article27300313_2.jpg

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  • Il était une fois...

      […] J’avais huit ans et je n’avais jamais vu mon frère pleurer. Pourtant, sans être une aussi grande lectrice que lui, je comprenais déjà ce qu’il ressentait. Je savais déjà qu’un livre est le seul remède à la solitude.

    J’avais commencé, moi aussi, à vivre deux vies parallèles. La vie normale et la vie dans les livres. La vie normale était… normale, et incroyablement solitaire, même avec des parents, des frères, l’école, quelques camarades. Jamais, adulte, même en des instants de grand désarroi, je n’ai retrouvé cette sorte de solitude si particulière de l’enfance. Je me souviens de toutes ces pensées dans ma tête, que je gardais pour moi parce que je ne savais pas les dire, ou parce que je craignais qu’on ne les trouve trop étranges. Et je me souviens de l’étirement infini du temps. J’attendais presque tout le temps quelque chose. Que mes parents se réveillent. Que la journée d’école finisse. J’attendais le mercredi, et quand le mercredi était passé j’attendais le samedi. J’attendais qu’on m’emmène quelque part. J’attendais l’heure d’Amicalement vôtre. J’attendais que la pluie cesse pour pouvoir sortir. J’attendais, je crois, un événement imprévu, important, dont j’ignorais la nature, mais je l’attendais fiévreusement. Et les minutes s’étiraient comme des heures.

    Quand je lisais je n’attendais plus. Ou alors c’était une toute autre sorte d’attente. J’attendais de voir ce qu’allait dire Mme Mc Miche quand elle découvrirait les têtes démoniaques dessinées sur les fesse du bon petit diable. J’attendais, en retenant mes larmes, de savoir si Rémi, le héros de Sans famille, allait retrouver sa mère. La vie dans les livres me paraissait plus vraie. Plus dense aussi, plus sûre, mieux écrite. Et il me suffisait de lire une seule phrase de n’importe quel livre pour que mon sentiment de solitude s’évanouisse. Pulvérisé. […]

     

    Florence Seyvos in « Lire est le propre de l’Homme - De l'enfant lecteur au libre électeur ». Témoignages et réflexions de cinquante auteurs de livres pour l'enfance et la jeunesse édités à l'école des loisirs. 

    A commander gratuitement sur www.ecoledesloisirs.fr

     


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